Haïti : Dans le tourbillon du pouvoir et du désespoir

Article : Haïti : Dans le tourbillon du pouvoir et du désespoir
Crédit: Voice of America via Wikicommons
20 avril 2024

Haïti : Dans le tourbillon du pouvoir et du désespoir

Dans l’ouragan chaotique qui secoue Haïti, chaque jour apporte son lot de défis insurmontables. Gangs armés, famine, exode des jeunes, coût de la vie exorbitant… Face à cette spirale descendante, une seule constante persiste : la soif de pouvoir des politiciens…

Voice of America via Wikicommons / Pneus brûlés

L’imbroglio politique

Le récent décret publié dans Le Moniteur (journal officiel haïtien), désignant les neuf membres du Conseil Présidentiel, a suscité des interrogations légitimes. Pourquoi ne pas privilégier la simplicité en optant pour un consensus autour d’un président chargé de mener une transition efficace dans un délai précis ? Malheureusement, cette approche directe est souvent éclipsée par les subtilités politiques d’Haïti.

Est-il possible de simplifier quand la complexité semble la norme ?

Les observateurs se demandent comment ces neuf individus parviendront à s’entendre dans un pays où le compromis politique est souvent synonyme d’intérêts personnels au détriment du bien-être national. Certains voient en cette mascarade politique une opportunité pour neuf futurs nababs de s’enrichir au détriment d’une population naïve et souffrante. Leurs nominations aux postes clés de l’État, des consulats et des ambassades, ainsi que la création d’emplois fictifs pour leurs proches, semblent inévitables.

Entre aspirations et manipulations

Le Conseil Présidentiel n’était qu’une des nombreuses propositions envisagées. Certains auraient préféré qu’un juge de la cour de cassation soit nommé président, tandis que d’autres auraient volontiers pris les rênes eux-mêmes. Dans cette cacophonie politique, chacun est prêt à tout pour sa part du gâteau (du pouvoir). Et quelle que soit la décision prise, une opposition se formera, souvent mue par des intérêts personnels plutôt que par une véritable volonté de servir le pays.

Malheureusement, l’avidité politique ne vise jamais l’intérêt supérieur de la nation. Pour beaucoup, les ressources de l’État sont un butin à se partager, chaque acteur cherchant à s’approprier la part la plus belle. Les véritables agents du changement sont souvent peu nombreux, mal informés sur le fonctionnement du système, et trop crédules à l’égard de manipulateurs sans scrupules.

Le résultat ? Une détérioration continue de la situation, avec un jeu de bouc émissaire permanent et une justice inexistante. Pendant que les jeunes se détournent du pays, désireux de fuir à tout prix, les politiciens érigent un système qui leur garantit l’impunité. La confusion règne sur les prérogatives du pouvoir, tandis que les véritables représentants du peuple se perdent dans un paysage politique chaotique.

Qui sont ces militants politiques ? Ils se divisent en deux catégories : les idéalistes et les manipulateurs. Les premiers, souvent jeunes et enthousiastes, croient sincèrement en leur cause, mais finissent par se heurter à des vieux roublards qui exploitent leur ferveur. Les seconds, maîtres dans l’art de la manipulation, voient le militantisme comme une opportunité de profit. Pour eux, la politique est une affaire de pragmatisme, où les alliances se font et se défont au gré des intérêts financiers.


Haïti : 40 ans d’instabilité politique

1986 : le dictateur Jean-Claude Duvalier est chassé par un soulèvement populaire.

1991 : Le prêtre Jean-Bertrand Aristide, élu président en 1990, est renversé par un coup d’État militaire. Il est rétabli dans ses fonctions grâce à une intervention militaire américaine.

Réélu en 2000, Jean-Bertrand Aristide quitte à nouveau le pouvoir en 2004, sous la pression des États-Unis, de la France et du Canada. De 2004 à 2006, les affaires du pays sont gérées directement par l’ONU.

2016 : Michel Martelly, élu en 2011, finit son mandat en 2016 sans successeur, après l’annulation de la présidentielle de 2015. Le Parlement désigne un président provisoire. Jovenel Moïse est élu fin 2016.

Le 7 février 2021, le pouvoir judiciaire décrète la fin du mandat présidentiel. Jovenel Moïse estime, lui, qu’il lui reste un an au pouvoir. Le président est assassiné chez lui le 7 juillet.

En plein vide juridique, le Premier ministre Ariel Henry se maintient au pouvoir au-delà du 7 février 2022, qui devait marquer la fin du mandat du président Moïse

Le 11 mars 2024 Ariel Henry démissionne.



Une société déchirée, au bord du précipice

Dans ce jeu sans foi ni loi, personne ne pense au bien-être du pays. L’audace et la malhonnêteté sont récompensées, tandis que la justice reste lettre morte. Les médias, inféodés aux différents camps, alimentent la confusion et la méfiance. Dans ce chaos généralisé, la jeunesse aspire à un avenir meilleur ailleurs, les religieux prient pour un miracle, et les charlatans profitent de la crédulité des masses.

Haïti, prisonnière du pouvoir et du désespoir, semble condamné à une spirale infernale. Tant que la cupidité et l’impunité régneront, le pays continuera de sombrer dans le chaos. Il est temps pour les Haïtiens de se réveiller, de prendre leur destin en main, et de se dresser contre ceux qui sacrifient l’avenir du pays pour leurs propres intérêts égoïstes.

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